J’écris cette petite chronique suite à un échange vu sur BFM entre un essayiste dont je n’ai pas noté le nom (vacciné mais qui voulait poser les questions éthiques) et une députée LREM dont je n’ai pas plus noté le nom. Le courage de ce jeune essayiste oblige.

Qu’est-ce que ce thème a à voir avec la laïcité ?
La laïcité c’est placer la rationalité (la science ou le plus probable) comme condition à un débat collectif. Il s’agit d’admettre des faits vs croire. Or si l’on accuse les antivax d’être dans la croyance, jusqu’au complotisme, on néglige que l’argument du bon sens (ça va de soi, ça tombe sous le sens, c’est l’évidence même) utilisé dans la communication de guerre du gouvernement, et reprise en boucle par les médias, est une façon d’interdire le débat contradictoire, ce qui est contraire évidemment à la laïcité, son esprit et sa lettre. La raison laïque n’est pas le scientisme, et nous aurions tout intérêt à reprendre cette question.

Le bon sens ne serait pas un argument recevable ?

Ça dépend du sujet. Si je jette une pierre en l’air, le bon sens c’est de ne pas rester dessous. Si je m’étouffe en émettant du CO2, le simple bon sens est d’arrêter d’en émettre, si je détruis la planète qui me nourrit, le simple bon sens est d’arrêter de la détruire. Mais dans le cas du vaccin, on peut discuter : en quoi un vaccin pour tous – ARN en l’occurence, soit la Rolls des vaccins m’a-t-on dit, contrairement aux vieux vaccins –  est-il une solution du bon sens, qui ne se discute pas donc. Avec le bon sens, on évacue des questions philosophico-politiques, essentielles pourtant pour qui veut assumer la responsabilité de sa vie. Par exemple : 1 Doit-on se prémunir de tout ? 2 En termes sociétaux, quelles portes j’ouvre avec une vaccination ARN ? 3 Existe-t-il une limite à la prévention par la vaccination ? 4 La prévention vaccinale (tous anonymes) doit-elle prendre le pas sur le soin (chaque individu est unique) ?…

On ne peut pas nier l’effet puissant et salutaire sur la santé publique de la vaccination

On peut avancer que dans des maladies où le développement est difficile à contrôler (épidémie, pandémie), le traitement insuffisant ou les conséquences terribles (polio), le vaccin trouvera du sens chez la quasi-totalité de la population. Il restera bien sûr quelques antivax qui considèrent que la nature fait sa sélection et que l’on n’a pas à s’en mêler. Ils doivent pouvoir le dire car ça peut être un choix de société qui appartient au peuple et qui n’est pas médical mais philosophique. Mais à chaque vaccin la question devrait faire l’objet d’un examen populaire et non pas exclusivement médical et économique. On peut décider par exemple qu’il faut soigner plutôt que de prévenir systématiquement. Dans le cas de la COVID, le pouvoir central impose une vision de la société qu’elle n’a pas mise en débat, plus exactement il a empêché le débat d’une manière très musclée. Et c’est la manière plus que la finalité qui fait problème car la finalité peut être partagée par la population. 

Quel est ce débat empêché ?

Le premier débat interdit est celui que le Dr D. Raoult a posé explicitement mais à sa manière, frontalement, révélant ainsi la violence du débat entre deux médecines : la médecine scientifique et les sciences médicales. On pourrait dire que les finalités sont les mêmes – je n’en suis pas sûr cependant – ce qui est sûr c’est que l’objet du soin n’est pas le même. Dans la médecine scientifique on soigne un sujet,  dans la deuxième un cas, un corps, une maladie. Dans la première un placébo a sa place, dans la deuxième il n’en a pas. Dans la première le médecin a la responsabilité du diagnostic et du soin, dans la deuxième la machine, l’algorithme, le remplace. Le conflit s’est mené sur l’existence du médecin en tant que personne, avec sa faillibilité donc avec une charge psychologique importante, ou du médecin en tant qu’intermédiaire entre la machine infaillible et le cas clinique, donc plus reposante. L’Etat a suivi le choix des lobbies pharmaceutiques et industriels, et la presse a emboité le pas avec un parti-pris surprenant : les journalistes sont remplacés de plus en plus par les smartphones et ils s’en plaignent ! Nota, il se passe la même chose en psychologie ou la rencontre intersubjective est dénigrée et remplacée par la médiation, via des outils ; on n’accompagne plus un sujet dans ses choix, on le rééduque ! L’Etat veut placer les psychologues en prestataires de service des médecins et les étudiants sous leur contrôle. La psychanalyse a été déclarée à abattre de toute urgence pour cause de non-scientificité ; il est impossible de faire un groupe de contrôle avec des gens qu’on ferait semblant d’accompagner tout en leur faisant croire qu’on les accompagne, c’est bien la preuve…

Dans les deux cas ces médecines sont scientifiques

Oui, et c’est cette accusation de non-scientificité des résultats de l’IHU de Marseille qui est significative du caractère idéologique de la bataille. Mais le Dr Raoult s’est comporté en médecin classique, comme ça se pratique dans la plupart des pays dans les mêmes circonstances ; c’est l’interdiction de soigner qui est nouvelle pour ne pas dire révolutionnaire. Mon médecin n’avait que du doliprane à proposer. Mais c’est un classique pour tout pouvoir que d’utiliser les moments de crise pour avancer d’une case dans son projet idéologique, et le bon sens est à cet endroit : pas de temps à perdre avec des réflexions philosophiques à la c… Et bien sûr, dans l’urgence d’un danger la concernant, la majorité acquiescera. Il est difficile de résister à la logique du rouleau compresseur.

Les machines ont un diagnostic plus fiable que les médecins, jusqu’à remplacer bientôt les chirurgiens.

Oui, mais il y a une différence de taille. Qui contrôle la machine contrôlera mon corps donc ma vie. Il y a du monde derrière la machine et des intérêts financiers énormes. Le médecin lui est dans la négociation avec son patient, on ne négociera pas avec la machine donc avec ceux qui les programment. Par exemple, faire passer l’hypertension de 16 à 15 a augmenté le nombre de malades donc les revenus de l’industrie pharmaceutique. Qui décide de la norme ? Des algorithmes ou moi avec mon médecin ?

Autre différence de taille, je peux être déclaré malade par une machine, soignée par un traitement décidé par la machine, et déclaré guéri par la machine sans jamais avoir pu définir clairement un ressenti. La subjectivité est chassée par la grande porte, je ne sais pas par quelle lucarne elle va revenir car je n’imagine pas qu’on puisse s’en débarrasser vraiment. 

Dernière différence de taille, ma responsabilité de sujet. On rentre à petit pas, mais sûrement, dans un monde normé par… ? En fait on ne sait pas vraiment si c’est décidé ou que « le progrès » s’impose à nous sans que nous le voulions vraiment. Je penche pour la deuxième hypothèse car c’est toujours le cas avec les hommes : nous construisons des objets qui nous transforment en retour. Et nous avons les pires difficultés à nous arrêter pour en faire l’analyse car il est difficile de renoncer à une innovation. On devrait se rappeler de cette formule : quand on a un marteau dans la tête, on voit tout sous la forme d’un clou ; hélas on a trouvé le marteau et moi j’ai perdu le nom de l’auteur.

Je prendrai le temps une autre fois de parler de Kaïros, le moment opportun, l’opportunité à saisir, pour distinguer ces deux médecines.

Mais concrètement, ce vaccin ARN sauve des vies

C’est l’argument du bon sens qui sert du bulldozer, et nous sert à oublier les vaccins par virus inactivés. Les américains ont prétendu que les bombes atomiques balancées sur Hiroshima et Nagasaki ont sauvé des vies en arrêtant la guerre, personne ne le saura jamais ; l’argument de l’efficacité est discutable quand on ne sait pas le nombre d’autres malades que la stratégie actuelle génère, la situation psychologique par exemple est catastrophique. Je voulais simplement dire qu’il y a un au-delà de cette évidence qu’on ne peut nier. Parenthèse, il faudrait vérifier aussi le nombre de maladies qui sont devenues chroniques, c’est-à-dire que l’on ne guérit plus mais dont on soulage les symptômes. Le débat philosophique me semble-t-il, rendu impossible par l’urgence déclarée est : à quoi sommes-nous prêts à renoncer pour rester vivants ? Si vous dites tout, alors préparez-vous aux vaccins ADN, aux vaccins contre la dépression, contre l’alcoolisme, contre tout, au transhumanisme. Ça tombe bien, c’est la suite logique du progrès pensé comme l’innovation. Or il n’y a de progrès qu’humain, c’est à nous de dire ce qui est un progrès et ce qui n’est qu’une innovation dont on pourrait se passer pour rester humain.

Mais ça ne correspond pas à la logique du business qui a besoin de malades

Le business, l’actionnaire pour être plus précis, a besoin d’un marché rentable. Qu’il y ait des malades ou aucun grâce à la prévention, c’est la même chose pour lui si le bénéfice financier est au rendez-vous dans la prévention. Dit autrement, si vous pensez qu’en cessant d’être malade grâce aux multiples vaccins vous allez faire des économies, vous risquez d’être déçu.

Pour finir, je vous invite à cliquer sur le lien ci-dessous. J’ai tapé sur mon moteur de recherche, qui n’est pas google : Institut Pasteur, vaccin ADN, et j’ai cliqué sur le site de l’Institut pasteur.fr. Je ne m’attendais pas à ce que j’ai trouvé.

https://www.pasteur.fr/fr/sars-cov-2-covid-19-institut-pasteur/projets-recherche/covid-19-vaccin-adn

PS : la question : voulez-vous être un OGM pour votre santé ? Ne nous sera posé que lorsque l’opinion aura été préparée à répondre conformément à l’idée de celui qui pose la question, donc après une préparation médiatique qui peut durer des années. C’est cela une démocratie d’opinion, et c’est pour cela que la quasi-totalité des médias appartiennent à des groupes privés ; et c’est pour cela que nous ne sommes pas une République laïque, seulement à prétention laïque.